Aïe mes oreilles

Yukio avait tellement peur que Kaito ne le rejette qu'il serrait ses bras autours de sa taille aussi fort qu'il pouvait, sans lui faire mal toutefois. Encore une fois, les secondes lui parurent durer une éternité, mais cette fois il se sentait si bien que si le temps pouvais s'arrêter, ce serait parfait. Cette chaleur qui l'irradiait à présent était si addictive et réconfortante, qu'il ne voulait plus le lâcher. En sentant les mains de son cadet se poser sur les siennes, il desserra légèrement son étreinte et resta ainsi aussi longtemps qu'il le put. Il fallait en profiter, il n'aurait sans doute plus autant de chance plus tard.

En sentant Kaito bouger, Yukio crut encore une fois qu'il allait s'éloigner, que le rêve allait s'évanouir, mais il ne fit que se tourner vers lui, sans quitter ses bras. Son regard se perdit dans celui de son cadet, il aurait pu s'y noyer sans rien regretter. Un doux sourire fleurit sur ses lèvres alors que son cœur ronronnait de bien être.

« Kaito… » Souffla-t-il en réponse au murmure du plus vieux, tout en gardant toujours son sourire.

Sourire qui ne mourut que lorsqu'il sentit les lèvres du plus jeune se poser sur les siennes. Une explosion de sensations se diffusa dans tout son corps, c'était juste un contact léger pour l'instant, mais tellement fort pour lui. Quand le baiser s'intensifia et qu'une langue curieuse vint à la rencontre de ses lèvres puis de sa langue,  Yukio crut qu'il allait défaillir, tant les sensations qui le submergèrent étaient fortes. Contrairement à leur premier baiser de la veille, celui là était doux et pourtant tellement plus significatif pour le plus vieux. Etait-il au Paradis en cet instant ? Il aurait pu jurer que oui. Embrasser quelqu'un pouvait vraiment être aussi bon ? Un léger gémissement de bien-être lui échappa sans qu'il ne s'en rende compte.

Quand Kaito s'écarta, il lui fallut un moment avant de revenir à  la réalité, son sourire d'extase s'évanouissant au fur et à mesure qu'une sensation de vide s'emparait de lui. Il avait soudain froid d’être si loin de lui alors qu'il n'était qu'à deux ou trois mètres, assis sur le rebord de la fontaine. Un nouveau sourire fleurit sur ses lèvres, lui apprendre à jouer, il le lui avait bien promis. Le plus vieux s'installa près de lui, collant son épaule contre la sienne, innocemment.

« Bien sûr que je vais t'apprendre. Et tu n'es pas si nul que ce que tu peux le penser. Tu progresseras vite, j'en suis sûr… »

Yukio attrapa la guitare et joua un petit air qu'il avait écrit peu de temps avant, fredonnant des paroles qu'il n'avait pas encore écrites. Il la rendit ensuite à son propriétaire avec un sourire.

« C'est une bonne guitare que tu as, elle a un bon son et elle est bien accordée. Tu veux commencer par quoi ? »

Kaito ne comprenait pas pourquoi la présence toute proche de son aîné avait cet effet sur lui. C'était très loin d'être la première fois qu'il enlaçait un garçon et encore moins la première fois qu'il en embrassait un. Or il était troublé, agité et il n'aurait pas fallu grand chose pour qu'il se mette à rougir comme une collégienne. Et il n'aimait pas ça car il se flattait d'avoir un sang froid à toute épreuve. Il fallait qu'il se calme. Yukio n'était pas son petit ami et il était probable qu'il ne le devienne jamais, il fallait qu'il arrête de l'embrasser ou de se sentir tout chose dès que le plus âgé le touchait, même de façon innocente comme maintenant.

- Ah... Ah oui tu trouve ? balbutia-t-il à sa grande honte en se décalant légèrement pour que leurs épaules ne se touchent plus. Bah... tu t'y connais mieux que moi en la matière ne. Moi je suis un néophyte.

Il espérait que son geste de recul paraissait assez naturel pour ne pas être blessant. Il n'aimait pas ce qui se passait en lui vis a vis de Yukio, mais il ne souhaitait pas pour autant que du mal arrive à son unique ami. Son ami. Il n'en avait jamais eu avant. Entre son lien fraternel exclusif avec Koya et sa propension à draguer tout ce qui bougeait, que ça porte un pantalon ou une jupe, il n'avait jamais pu en garder un ou une. Ils et elles avaient tous fini par devenir des conquêtes. Alors il ne ferait pas la même erreur cette fois. Yukio resterait un ami, il ne sortirait pas avec lui. Et pour ça il fallait qu'il arrête de l'enlacer, de l'embrasser et de le toucher de manière plus générale.

- Je sais pas trop par où on devrait commencer, c'est toi qui décide, Yukio-sensei, lui dit-il encore en souriant. Par contre je te préviens, je sais pas lire les notes alors si tu compte me faire lire des partitions, c'est mort. Je joue à l'oreille.

Yukio ne comprenait pas ce qu'il se passait ? Pourquoi la présence de ce presque inconnu à ses côtés avait un tel effet sur lui ? Rien que ce léger contact entre leurs épaules lui envoyait des décharges électriques dans tout le corps. Son cœur s'emballait et une douce chaleur agréable le submergeait. S'il avait pu souhaité une chose à l'instant, ce serait que le temps s'arrête pour rester près de Kaito éternellement. C'était la première fois qu’il pensait ainsi et ça le perturbait pas mal, mais près de ce jeune homme presque inconnu, il se sentait comme complet, comme s'il retrouvait une partie de lui qui lui manquait depuis toujours. Quelle sensation bizarre. Un doux sourire n'arrivait pas à disparaître de ses lèvres tant il se sentait bien.

Hélas, cette sensation de bien-être ne dura pas. Kaito s'écarta de lui, de façon à ce que leurs épaules ne se touchent plus. Le sentiment de vide qui s'empara alors de Yukio fut violent et son cœur lui fit ma, presque instantanément. Il se figea alors, ne laissant rien paraître, son sourire toujours présent , malgré l’incompréhension qui s'emparait de lui. Un espoir subsistait tout de même qu'il ne s'agissait que d'un mouvement involontaire de Kai, mais vu sa façon de rester à quelques centimètres de lui, sans se rapprocher, son espoir s'amenuisait ce plus en plus et le vide en lui grandissait. Malgré tout, Kaito n'était pas parti loin de lui, sans doute devait-il se contenter de ça. Mais après ce baiser qu'il lui avait donné, il ne voulait même plus le frôler ? Yukio était totalement perdu. La guitare serait-elle alors leur seul lien ? Il ferait tout pour ne pas qu'il disparaisse lui aussi.

Soupirant discrètement, essayant de se reprendre et de retrouver un semblant de bonne humeur, Yukio ne voulait pas que Kaito ne remarque qu'il l'avait blessé à s'éloigner ainsi, il ne voulait pas s'imposer à lui s'il ne voulait pas de lui. Retrouvant son ton enjoué et son sourire, il se promit de partager tout son savoir musical avec lui.

« Ce n'est pas mal de jouer à l'oreille, même si c'est mieux de savoir lire la musique, beaucoup jouent à l'oreille. »

Le jeune chanteur se demandait comment transmettre ce qu'il savait à son nouvel élève. Lui apprendre les accords, alors qu'il ne savait pas lire les partitions, n'était peut-être pas le mieux pour commencer.

« Hum… Y a-t-il une chanson que tu voudrais apprendre à jouer en particulier ? »

Il était impossible à Kaito de ne pas remarquer l'air déçu et même malheureux de Yukio lorsqu'il s'était écarté de lui de quelques centimètres et honnêtement, cette mine déconfite était un véritable crève-cœur pour le jeune homme qui, au fond, avait le cœur tendre sous des dehors un peu bourrus. Mais s'il ne voulait pas voir son aîné terminer sur son tableau de chasse comme la quasi-totalité de ses connaissances masculines… il devait vraiment mettre le holà à ce qui les poussait très manifestement l'un vers l'autre. S'il voulait vraiment épargner son nouvel ami, il devrait même carrément ne plus jamais le revoir… mais ça il ne s'en sentait pas capable. Sinon il ne lui aurait pas donné rendez-vous à cet endroit la veille. Il se disait fort, mais en fait il était faible. Faible face à Yukio, ses grands yeux, son air candide et son enthousiasme. C'était la première fois depuis bien longtemps qu'il se sentait si faible face à quelqu'un et il se sentait partagé face à cette sensation.

- Une chanson que je voudrais apprendre ? Bah j'aime bien les trucs à la mode, alors une chanson d'un groupe connu ça ira. Arashi, News… Ce genre de groupe quoi si tu connais.

Il fallait qu'il éloigne les pensées de Yukio de lui-même et de leur relation, alors le faire réfléchir en tant que prof était une bonne solution. Le problème était que, pour lui apprendre, il fallait nécessairement que l'aîné soit proche, voire très très proche de lui. Il avait eu l'occasion de sentir l'odeur de ses cheveux quelques instants auparavant et ça avait manqué le rendre fou. Il était très sensible à plusieurs choses : les larmes, les yeux de chat potté et les odeurs agréables. Et Yukio cumulait les trois. Il sentait au fond de lui, qu'il faudrait très très peu de choses pour qu'il tombe tout cuit dans les bras de son aîné.

L'épaule de Yukio continuait de se réchauffer grâce à la chaleur qui irradiait de Kaito, qui pourtant gardait à présent une distance minimum de quelques centimètres entre eux. Le blondinet était totalement perturbé, il sentait la chaleur et l'odeur de Kaito l'envelopper, sa voix qui ronronnait au creux de son oreille. Mais il était en même temps si loin, ce petit espace entre eux lui semblait être un gouffre incommensurable, comme s'il ne pourrait plus jamais l'atteindre. Son cœur ne savait visiblement plus comment réagir face à cette multitude de sensation controverses, il semblait vouloir se déchirer, en tout cas il faisait souffrir son propriétaire.

Il avait beau se dire qu'il était résigné, qu'il devait se faire à l'idée de cette distance, qu'il s'était imaginé des choses bizarres bien trop vite, que ce qu'il ressentait près de lui n'était que chimère, qu'il n'était qu'un nouvel ami… Chaque mot que son ami prononçait résonnait comme une magnifique musique dans son oreille, rallumant instantanément la moindre flamme qu’il avait tant de mal à tenter d'étouffer. Un agréable frisson parcourut tout son corps en entendant la phrase de Kaito, pourtant bien anodine.

« Oh News… J'adore… » Se reprit le petit blond en entendant parler d'un de ses groupes préférés. « J'aimerais savoir chanter aussi bien que Tegoshi… Il a une telle voix, à la fois douce et forte… La voix d'un ange… Et il est beau comme un ange aussi… » Haha… Fan de Tesshi ? A peine… « Oups… Désolé… Une chanson de News pour commencer c'est une bonne idée. Ai Nante est assez simple, elle se fait normalement au piano  mais à la guitare ça fera très joli aussi. »

Kaito sentait bien qu'il était tout sauf naturel, mais avec tout ce qui se passait en lui depuis qu'il connaissait Yukio (c’est-à-dire depuis la veille), il ne savait plus comment réagir. Se concentrer sur la guitare et ce qu'il devait jouer était le plus simple pour ça. Positionnant ses doigts, il commença à jouer les premiers accords de la chanson suggérée par son aîné selon ce qu'il se souvenait, en chantonnant l'air à voix basse. Mais il n'était hélas pas aussi concentré qu'il l'aurait voulu car malgré la petite distance qui les séparait, le jeune homme sentait la chaleur du corps de Yukio à travers ses vêtements. Il multiplia les fautes d'accords et manqua même plusieurs mesures, surtout que malgré lui, son regard revenait régulièrement sur les lèvres qu'il avait déjà pris deux fois. Des lèvres très douces et infiniment tentantes. Il n'avait pourtant pas "la dalle" comme l'avait Koya, mais il ne pouvait nier que le plus âgé l'attirait d'une façon inimaginable.

- Si on allait au karaoke plutôt ? finit-il par proposer sans bien savoir pourquoi puisqu'il chantait aussi mal qu'il jouait.

Mais en fait il se disait que dans un autre contexte, il aurait peut-être moins envie de l'embrasser. Il rangea donc sa guitare sans attendre la réponse de l'aîné et prit sa main pour l'entraîner vers le métro le plus proche. Il n'allait pas souvent au karaoke mais il savait que les Echo étaient la plus grande chaîne en la matière donc il ne devrait pas être trop difficile d'en trouver un quelque part dans Kyoto. Pas vers l'aquarium, c'était trop éloigné du centre ville, mais probablement vers la gare. Avec tout le monde qui y passait chaque jour, il pensait que ce serait même étrange qu'il n'y en ait pas plusieurs. Supposant que son aîné disposait lui aussi d'une carte de transport, il l'entraina dans la plus proche bouche de métro, ne s'apercevant qu'une fois dans la rame qu'il tenait toujours sa main. Il la lâcha brusquement et feignit de s'absorber dans la lecture du plan qui apparaissait sur le petit écran à côté de la porte.

Qu'il était difficile pour le plus âgé de savoir où il en était dans son cœur et son esprit. Le gouffre qui le séparait du plus jeune, enfin ces quelques centimètres, était bien trop grand, et le fait de le toucher lui manquait terriblement, cette sensation lui oppressait le cœur comme il ne l'avait jamais été. Et pourtant, Kaito était tellement proche de lui qu'il sentait la chaleur de son corps réchauffer le sien. Cette chaleur si douce lui engourdissait agréablement le corps et son cœur ne savait plus s'il devait ronronner doucement ou battre la chamade. A chaque instant, Yukio repensait à ces baisers que lui avait volés Kaito. A chaque fois, son cœur faisait une embardée et une vague de frissons le submergeait. Il lui fallait à chaque fois plusieurs longues secondes pour pouvoir retrouver son calme, mais à chaque fois, son regard glissait de nouveau vers les lèvres du plus jeune et son cœur s’emballait de nouveau.

Pour ne plus penser aux lèvres délicieuses de son voisin, le blondinet essaya de se concentrer sur ses doigts et aux notes qu'ils sortaient de l'instrument. Après tout il avait décidé de devenir sn prof, il fallait bien qu'il se concentre sr sin jeu pour pouvoir le corriger. Oui voilà, penser à la musique, pas à ses lèvres, oui c'est pas, pas à ces deux bouts de chair rosée terriblement attirants, ne pas penser aux sensations qui l'avaient submergé alors… Ah… Stop… La guitare… Oui ne penser qu'à la guitare et à la douce mélodie de cette magnifique chanson… Ouille et aux fausses notes aussi. Un petit sourire amusé lui échappait lorsqu'il se trompait. Bizarrement, les erreurs se multipliaient plus le temps s'écoulait. Un manque de concentration ? Quelle pouvait en être la cause ? Lui non lus n'était pas trop concentré, ou plutôt il se concentrait sur autre chose que ce sur quoi il aurait dû. C'est pourquoi, lorsque Kaito cessa de jouer et lui parla, il ne lui répondit pas, pas encore revenu à la réalité.

Il fallait bien que Yukio réponde quelque chose à la question que Kaito lui avait posée. Mais quelle était-elle ? Alors qu'il  réfléchissait, le plus jeune lui attrapa la main et l'entraina avec lui. Où allaient-ils ? Aucune importance, seule cette chaleur qui irradiait depuis sa main comptait. Il ne remarqua même pas qu'ils étaient arrivés dans le métro, ayant sans doute validé son titre de transport machinalement, sans s'en rendre compte. Il ne revint une nouvelle fois à la réalité que lorsque cette main si chaude lâcha la sienne. De nouveau ce vide immense s'empara de lui, et pour le combler, il profita d'une secousse pour s'accrocher à lui.

« Où veux-tu qu'on aille Kaito ? »

Sans répondre, le jeune homme qui n'avait pas lâché la main de son compagnon, s'engouffra dans le premier Echo à portée comme s'il avait le diable à ses trousses. Il donnait l'impression de fuir et en toute franchise, c'était en gros ce qu'il était en train de faire : tenter de fuir ce qu'il commençait à ressentir, de fuir ce que lui inspirait Yukio. Projet voué à l'échec puisqu'il n'avait pas pu se résoudre à s'éloigner dudit Yukio, alors que ça aurait été la meilleure chose à faire, aussi bien pour lui-même que pour son aîné. Avoir des sentiments, c'était quand même super compliqué.

- J'ai plus très envie de faire de la guitare, alors je me suis dit qu'un karaoké serait sympa, expliqua-t-il au plus âgé dans un petit sourire à peine convaincant. Bon je chante comme une casserole cabossée, mais quelque chose me dit que c'est pas ton cas, alors je serais content de t'écouter.

Sur ces mots et sans laisser à Yukio le loisir d'exprimer son opinion sur la question, il se dirigea vers la caisse et demanda un box pour deux, puis se dirigea vers celui-ci. Il fallait à tout prix qu'il ait un comportement normal, sinon son aîné allait sinon se poser des questions, ou du moins s'inquiéter. Ouvrant la porte, il déposa sa guitare sur la banquette en skaï, puis informa son compagnon qui lui avait emboîté le pas, qu'il allait chercher des boissons pour eux deux puisque celles-ci étaient à volonté.

- A propos, je crois que je ne t'ai encore demandé aucune information sur toi, dit-il en revenant dans la pièce en poussant la porte de celle-ci d'un sexy coup de hanche que n'aurait pas désavoué Koya, avant de poser deux verres de soda sur la table basse. Alors raconte-moi tout : tu fais quoi dans la vie ? Je suis presque sûr que tu n'es plus étudiant.

Kaito lui avait repris la main et Yukio avait de nouveau quitté la réalité, le suivant sans tenir compte de rien à part la chaleur de la main de son compagnon autours de la sienne. Il eut vaguement conscience qu'ils étaient dans un karaoke, un de ses endroits préférés, bien qu'il n'y vienne que rarement. Un endroit fait spécialement pour chanter ne pouvait que plaire au plus vieux, le chant et la musique ayant été depuis toujours le moteur de sa vie, enfin jusqu'à une certaine rencontre qui semblait avoir bouleversé toutes ses certitudes. Alors chanter avec Kaito… Yukio semblait être en plein rêve, et il lui répondit d'un magnifique sourire, incapable de formuler des mots.

Lui d'ordinaire assez timide, Yukio se rendit compte qu'il suivait Kaito, un presque inconnu, sans poser de question, sans même s'inquiéter. Il aurait sans doute même pu le suivre n'importe où aveuglément, et cette révélation lui fit presque peur. Mais en même temps, être avec le plus jeune était si grisant et lui apportait tant de sensations inconnues, qu'il en était incapable de réfléchir normalement.

Lorsqu'il se retrouva seul dans le box, le plus vieux revint à la réalité, essayant de calmer son cœur qui battait encore à tout rompre. Ne sachant quoi faire en attendant le retour du plus jeune, il s'installa sur la banquette et prit le classeur des chansons, tournant les pages sans vraiment les voir. Il sursauta en entendant la voix du jeune homme, lui répondant instantanément par un grand sourire.

« Oh… C'est vrai… » Se rendit-il alors compte, ils ne savaient rien l'un de l'autre, excepté leur prénom et leur âge, tout en se focalisant quelques secondes sur ce mouvement de hanches quelque peu… hypnotisant. « Je… C'est vrai je ne suis plus étudiant, j'ai dû arrêter lorsque le magasin de mes parents a fait faillite, on n'avait plus assez d'argent pour que je continue le conservatoire. Du coup on a quitté Tokyo et on est venus ici où j'ai commencé à essayer de travailler dans plusieurs petits boulots… Et au final… Je suis Hôte, au Papillon Rouge. » Yukio se tut alors, étonné lui-même de lui raconter ainsi sa vie, comme si c'était naturel. « Et toi que fais-tu ? Tu es encore étudiant ? »

En rentrant dans la pièce, Kaito nota immédiatement que son compagnon n'avait que vaguement ouvert le catalogue de chansons qui était toujours ouvert à la première page et se demanda ce qui l'avait empêché de se pencher vraiment dessus mais comme ce n'était finalement pas important, il haussa les épaules et s'assit près de lui, presque vautré, les bras étendus de part et d'autre de lui sur l'accoudoir. Il l'écouta ensuite parler de lui et il se sentit désolé de ce qui était arrivé à sa famille... mais le récit le conforta dans l'idée qu'il ne fallait à aucun prix que le doux et pur Yukio tombe entre les griffes de Koya. Ce serait une catastrophe et jamais son aîné ne s'en remettrait.
Mais quand il entendit la fin de sa phrase, la stupeur le fit se redresser et écarquiller les yeux, bouche bée. Hôte ?! Ce petit bout de mec, tout mignon, tout frêle et tout pur était hôte ?! Sérieusement ?! Non c'était impossible, il se fichait de lui. De ce qu'il savait, les hôtes étaient en général de grands types au charme ravageur, sûrs d'eux et de leur beauté et capable de faire faire n'importe quoi à n'importe qui. Il était d'accord qu'on aurait donné à Yukio le bon dieu sans confession et qu'on devait facilement avoir envie de faire n'importe quoi pour un sourire de lui... mais de là à se dire... Non il lui faisait très clairement une blague.

- Ah ah ah ! éclata-t-il de rire. Toi hôte ? Impossible !

Il riait tellement que son hilarité dégénéra carrément en fou-rire, avec yeux qui pleurent, mal au ventre et tout ce qui allait avec. Il ne voulait pas se moquer de son compagnon, mais l'imaginer jouant les lovers étaient une image si ridicule qu'il ne pouvait pas s'en empêcher. Après quelques minutes, il parvint pourtant à se calmer et, essuyant ses yeux, reprit :

- Désolé, j'espère ne pas t'avoir vexé, c'était pas mon intention. Pour répondre à ta question, je suis pas étudiant. Pour être honnête, le seul étudiant ici c'est Koya, qui étudie la médecine. Moi j'ai jamais aimé l'école alors j'avais pas envie de me prendre la tête avec une fac quelle qu'elle soit. Et j'ai pas de boulot, parce que vu que j'ai pas de diplôme, aucune boîte veut de moi. Du coup... je fais rien. Je sais, c'est pathétique...

Alors que Kaito s'était installé à ses côtés, le bras posé derrière lui sur le dossier de la banquette, Yukio se sentit automatiquement attiré vers lui, comme en présence d'un aimant géant. Il parvint tout de même à se retenir de se blottir contre lui, se contentant de ressentir la chaleur de son corps non loin. Lui parler de sa vie lui semblait étrangement naturel, mais il ne s'attendit pas à cette réaction lorsqu'il lui parla de son travail. Tout d'abord cette incrédulité, puis ce fou rire qui le vexa un peu au début, il avait l'impression qu'il se moquait de lui, mais à force ce son lui réchauffait le cœur. Entendre Kaito rire ainsi était plaisant, il le trouvait encore plus beau, si c'était possible.

« Mouh… si c'est vrai que je suis host… Enfin… J'ai commencé il y a peu de temps et peut-être que je ne suis pas très doué pour ça… » Yukio soupira avec un sourire amusé. « Ca y est tu es calmé ? »

Ainsi il n'était pas étudiant, et ne travaillait pas. Il devait s'ennuyer toute la journée alors. Yukio pourrait avouer qu'il ne comprenait pas trop que quelqu'un qui pouvait faire des études y renonce par choix, alors que lui aurait tellement aimé pouvoir continuer. Mais il se rendait compte aussi que chaque personne a une vie propre et ses priorités. En tout cas il ne trouvait ça en rien pathétique.

« Pourquoi dis-tu que c'est pathétique ? Je ne trouve pas… Que fais-tu de tes journées alors ? Tu ne t'ennuies pas trop ? »

L'espace d'une minute, Kaito crut avoir vexé son compagnon, mais finalement celui-ci se mettant à sourire, il comprit que ce n'était pas le cas et se détendit. Alors comme ça ce n'était pas une blague, il était vraiment hôte... Et bah une chose était sûre, il devait être très particulier comme hôte, parce que vu sa bouille... Puis quelque chose traversa l'esprit du jeune homme, ou plutôt une image désagréable : celle de Yukio, entouré d'hommes le serrant de près, buvant avec eux pour les faire consommer et déployant des trésors d'ingénuité pour les séduire. Horrifié de cette vision mentale, il secoua la tête pour la chasser, mais l'impression déplaisante resta.

- Je dis que c'est pathétique parce que ça l'est, répondit-il à la question de son aîné. Je sais parfaitement ce que les gens pensent des personnes comme moi qui font pas d'études et ont pas de travail : que ce sont des parasites de la société. L'opinion des gens, je m'en fous en fait, mais je sais moi-même ce qu'est la définition du pathétique. Et du coup, oui je m'ennuie la majeure partie du temps. C'est aussi pour ça que j'ai commencé la guitare, ça m'occupe un minimum, vu que je peux pas trouver de b...

Il s'interrompit brusquement et fixa Yukio comme s'il venait d'avoir une soudaine illumination.

- Dis... tu pourrais me présenter à ton boss au club ? Etre hôte, ça doit bien être un des seuls boulots qui demande aucune qualification particulière à part avoir de la tchatche et un visage agréable. Je me débrouille pas mal sur les deux plans alors... ce serait parfait.

Yukio repensa à son boulot d’hôte en se disant que Kaito n’avait peut-être pas tort, il n'était peut-être pas fait pour ça. Rien qu'à voir un de ses premiers clients, il avait réussi à l'énerver et ne se rappelait même pas la suite de la soirée. Pour être pathétique, lui l'était en effet. Mais, même s'il ne faisait pas partie de cette catégorie de gens "normaux", qui faisait de longues études ou qui travaillaient durs, pour lui kaito n'était en rien pathétique.

« Tu n'es pas pathétique… » Grommela-t-il.

Il allait continuer à grommeler quand il lui demanda de le présenter à son patron. Surpris, il s'imagina travailler avec lui, le voir tous les soirs, être près de lui plus souvent encore. Cette perspective fit battre son cœur et un grand sourire apparut sur ses lèvres.

« C'est une super idée… Je suis sûr que tu seras super en hôte. En plus on travaillera ensemble. »

Quand il avait formulé cette demande à ce garçon qu'il ne connaissait finalement quasiment pas, Kaito avait seulement vu le côté financier de cette profession qu'il n'aurait jamais envisagée encore dix minutes avant. Mais maintenant qu'il le disait, effectivement, cela induisait qu'ils allaient se côtoyer. Beaucoup. Et tous les soirs. Ce qui n'allait pas arranger la multitude de choses que ressentait le jeune homme auprès de Yukio. D'ailleurs, l'idée qu'il soit entouré d'hommes soir après soir était dérangeante au plus haut point pour le cadet. Mais bon, il devait passer outre tout ça s'il voulait travailler, parce que pour le moment, Koya ne disait rien et payait seul le loyer de leur appartement, mais il allait finir par en avoir marre si Kaito ne trouvait pas rapidement une façon de gagner sa part dudit loyer. Et de la nourriture aussi d'ailleurs.

- Ouais ce sera cool. Par contre j'ai pas de costume. Juste un jean propre et une chemise ça ira ? demanda-t-il au plus âgé. Je veux faire bonne impression pour qu'il m'engage direct.

Yukio était content que kaito trouve cool de travailler avec lui. Il se surprenait à avoir envie d'être si proche de lui, de rester aussi longtemps que possible avec lui qu'il ne connaissait qu'à peine. Que lui arrivait-il ? Il n'en avait aucune idée, mais ça lui semblait même presque trop naturel d'être avec lui. Un sourire toujours vissé sur ses lèvres, Yukio essayait d'imaginer Kaito en hôte, il devait être super beau.

« Oh ça ira sûrement… Sinon j'ai quelques costumes, il y en a sûrement un qui t'irait. Je suis sûr qu'il va accepter le boss. Tu seras un super hôte. »

Tout excité, Yukio glissa ses mains dans les cheveux de Kaito, comme pour le coiffer, un air d’ange heureux sur le visage. Lorsqu'il se rendit compte de ce qu'il faisait, ses mains restèrent en suspend alors qu'il se mit à rougir fortement.

« Oh…. Gomen… »

Il rammena ses mains à lui et se gratta la joue d'un air gêné.

- Oh sinon, j'emprunterait à Koya un des costumes qu'il porte pour ses récitals. L'avantage d'avoir un jumeau c'est qu'on fait la même taille, le même poids et qu'on a la même corpulence alors on peut s'échanger nos fringues comme on s'échangeait les mecs quand on était plus jeunes. Oups... désolé...

Il se rendit compte au moment où il le disait qu'il n'aurait pas du parler de la fâcheuse habitude que Koya et lui avaient lorsqu'ils avaient 16-17 ans. Surtout quand on parlait à un gars aussi pur et naïf que Yukio, qui ne devait même pas imaginer possible que des garçons tirent profit de leurs visages identiques pour prendre la place l'un de l'autre ou s'échanger leurs conquêtes.
Il s'apprêtait à ajouter quelque chose, mais le début de phrase mourut sur ses lèvres lorsque son compagnon passa sans prévenir les mains dans ses cheveux. Sans le savoir, l'aîné avait de nouveau fait un geste décisif, car pour Kaito, cela le renvoyait à ceux qu'avait leur mère dans leur petite enfance et il ferma le yeux pour mieux savourer le contact. S'il avait été un chat, il en aurait ronronné de bonheur.
Mais bien trop vite à son goût, le contact agréable prit fin et il rouvrit les yeux pour découvrir un Yukio rouge d'embarras. Le trouvant juste adorable comme ça, il cessa de repousser son désir de le serrer contre lui et le prit dans ses bras, avant de lui caresser la joue doucement, puis se pencha pour l'embrasser une nouvelle fois. Il s'était pourtant juré de ne plus le faire, mais résister à cet ange était bien trop difficile. Il rendait les armes.

Embarrassé par le geste qu'il venait de faire, geste qui devait sans doute être considéré comme déplacé par Kaito, Yukio se grattait la joue, les joues écarlates, un sourire gêné sur les lèvres. Que lui avait-il pris de faire ca ? Craignant de subir la fureur ou le dédain du plus jeune, il sursauta en le sentant l'enlacer. Serré entre ses bras, Yukio se retrouva presque assis sur lui et son cœur se mit à battre la chamade. Mais lorsqu'il lui caressa la joue doucement, il ferma les yeux et appuya contre cette main pour accentuer ce contact. La drogue, qui l'avait rendu accroc en seulement deux prises, le surprit une nouvelle fois lorsque les lèvres de Kaito se posèrent sur les siennes en un baiser.

Son cœur fit une nouvelle embardée, une vague d'électricité déferla en lui et un soupir de plaisir lui échappa dans le baiser. Ses mains glissèrent de nouveau dans les cheveux de Kaito, appréciant leur douceur, avant de passer derrière son cou pour se serrer encore un peu plus contre lui. Lorsque le baiser prit fin, le plus vieux ressentit encore une fois un grand vide et lança sans le vouloir un regard presque désespéré au plus jeune…

« Kai… » Lança-t-il dans un souffle avant d’initier de lui-même un baiser quelque peu maladroit.

Lorsque Kaito s'écarta de nouveau de son aîné, celui-ci avait encore l'air en pleine extase, ce qui fit comprendre au plus jeune qu'il était très certainement le premier à l'embrasser de toute sa vie. Sinon il n'aurait pas réagi aussi vivement à un simple baiser.

- Ecoute Yukio... Non... Ecoute Yu'... Je pense que ça sert à rien de se voiler la face concernant ce qui se passe entre nous... Je... Je suis pas le genre de mec qui s'attache d'habitude, mais depuis hier, tu... (il s'interrompit dans ses balbutiements et tenta de reprendre) Enfin on se connait que depuis à peine 24h mais visiblement, on... enfin aussi bien l'un que l'autre, on...

Il s'arrêta de nouveau en plein milieu d'une phrase. Il n'arrivait pas à se résoudre à prononcer le fait qui était encore si improbable, voire impossible moins d'une journée auparavant. En plus, il n'avait jamais cru au coup de foudre, il avait toujours pensé que c'était une invention des mangaka et des romanciers pour faire soupirer les minettes de tous âges et leur faire croire des choses qui n'existaient pas. Mais il n'était pas aveugle et il devait bien se rendre à l'évidence maintenant. Sinon pourquoi ressentirait-il sans cesse le besoin de le serrer contre lui, de l'embrasser ? Autrement, pourquoi se sentirait-il si mal à l'idée de le laisser, à l'idée que Koya pourrait mettre la main sur lui ? Koya... Brusquement, les mots de son jumeau refirent surface dans l'esprit de Kaito : "t'as jamais défendu personne comme ça, tu t'en tape d'habitude. Ce mec… il est différent pour toi [...] J'irais pas jusqu'à dire que t'es amoureux, parce que bah… j'en sais foutre rien et au pire je m'en fous un peu, mais pour moi y'a clairement un truc." Amoureux ? Lui qui n'était jamais tombé amoureux de personne et se contentait toujours d'aventures d'une nuit ? C'était tellement une idée étrange et pourtant...

- Yu'... est ce que tu crois au coup de foudre ? lui demanda-t-il finalement. Parce que... je sais pas pour toi, mais je crois... que c'est ce qui nous arrive...

Il semblait à Yukio qu'il n'aurait jamais assez des baisers de Kaito. Jamais encore il n'avait ressenti de sensations si fortes, qu'il ne comprenait pas encore. Est-ce que tous les baisers étaient comme ça ou était-ce juste avec Kaito ? Même si c'était une question qu'il pourrait se poser, Yukio ne pourrait même pas imaginer embrasser quelqu'un d'autre que lui.

Yu… Ce diminutif prononcé par le plus jeune lui provoqua une vague de frissons vraiment agréable dans tout le corps. Pendant que Kaito parlait, Yukio essayait de se concentrer sur ses paroles, mais son attention et son regard se focalisaient plutôt sur ses lèvres si tentatrices qu'il voulait goûter plus encore. Les mots lui parvenaient, et il comprenait qu'ils étaient importants, que Kai se confiait à lui. Aussi parvint-il à oublier ses lèvres un moment pour l'écouter et ce qu'il comprit fit battre son cœur encore plus fort. Kaito était attaché à lui, il ressentait des choses pour lui, probablement comme celles que lui-même ressentait pour le plus jeune.

« Un coup de foudre… Je… Je n'ai jamais pensé à ce que ça pouvait être… Tu crois que ça ressemble à ça ? C'est comme dans les films romantiques ? Je ne sais pas… » Yukio s'interrompit alors que son regard déviait à nouveau vers les lèvres de kai, avant de remonter vers ses yeux. « Je sais juste…. Que c'est la première fois que… je ne veux pas que quelqu'un s'éloigne de moi… que c'en est presque douloureux… Et je ne comprends pas pourquoi… »

Après sa question, il y eut un blanc pendant lequel le cœur de Kaito se mit à battre comme un fou dans sa poitrine. Il savait bien que depuis la veille, il avait eu de gros indices concernant les sentiments que Yukio pourrait nourrir à son endroit, mais comme jusque là, il n'avait jamais cru au coup de foudre et ne pensais pas non plus tomber amoureux, alors il angoissait à moitié de ce que pourrait lui répondre son aîné. Et puis comme il n'avait aucune expérience en matière de sentiments amoureux et pas de points de comparaison non plus, il était un peu perdu. Et s'il s'était trompé du tout au tout ? Mais les paroles qui sortirent de la bouche de Yukio le rassurèrent instantanément. Non il n'avait pas rêvé tous des signaux qu'il lui avait envoyés.

- Je peux pas être catégorique parce que j'ai absolument aucune expérience en matière de sentiments, mais... si j'en crois Koya... ce que tu décris correspond à ce que ressent une personne amoureuse. Tu... Comment dire... si tu n'as pas envie que je m'éloigne, si tu as envie de passer tout ton temps avec moi, si l'idée qu'il pourrait m'arriver quelque chose de mal t'es insupportable et si l'envie de... de me toucher et de m'embrasser à du mal à quitter ton esprit même une ou deux minutes... je pense que... que c'est ça.

Au fur et à mesure qu'il décrivait les symptômes pour aider son compagnon, le jeune homme se rendait compte que c'était précisément les siens qu'il décrivait. Merde, il était amoureux... Tomber amoureux en moins de 24h, comment était-ce possible ?

Au fil des paroles de Kaito, Yukio se mit à rougir de plus en plus. Tout ce qu'il disait, il le ressentait, il ne voulait pas qu'il s'éloigne, il pensait constamment à lui, à ses baisers, à sa chaleur, a son odeur. Il était donc bien amoureux. Le savoir lui provoquait encore plus de papillons qui virevoltaient ans son ventre. Et est-ce que Kaito ressentait la même chose que lui ? Il l'espérait tant. Le fait qu'ils ns se connaissent que depuis une journée à peine ne lui effleurait même pas l'esprit, ce qu'il ressentait sur le moment était la même chose que ce qu'il avait ressenti dès les premiers instants près du plus jeune.

« Alors c'est ça être amoureux ? C'est une sensation…. Fort plaisante… Grisante même... » Répondit Yukio avec un sourire doux. « Tu ne trouves pas ? Nyaaah… j'ai l'impression d'être sur un petit nuage. C'est fou… » Ajouta-t-il, tout heureux.

Pour lui, Kai était encore trop loin de lui, il serra alors ses bras autours de son cou, se rapprochant un peu plus encore, et posa sa tête contre son épaule, se mettant presque à ronronner.

N'arrivant pas à croire que l'impensable se soit produit et que lui, séducteur impénitent qui avait une nouvelle conquête par jour ou presque, se soit finalement attaché, se contenta de le serrer contre lui, son cœur continuant à battre comme un fou dans sa poitrine. Bon sang qu'il détestait quand Koya avait raison ! Malheureusement, son frère étant plus intelligent et clairvoyant que lui, cela se produisait souvent et cette fois ne faisait pas exception à la règle.
Posant une main sur la joue de son désormais petit ami, il le fit tourner la tête vers lui et reprit possession de ses lèvres, les pinçant doucement entre les siennes, les relâchant pour les reprendre de même la seconde suivante, avant de glisser sa langue entre les deux cloisons de chair rosée et d'approfondir le baiser.

- Il va falloir me parler de toi plus que ça maintenant, dit-il sans le relâcher lorsque le baiser prit fin. Je veux tout savoir à ton sujet : ton histoire, ce que tu aime et n'aime pas, ce qui te fait vibrer, comment tu as eu cette calamité ambulante que tu appelle un chien... bref absolument tout.

De sa main libre, il s'empara de son verre de soda et le vida d'un trait, mais n'osa pas sortir pour le remplir à nouveau, comme si son absence, si courte fut-elle, risquait de voir s'évanouir à son retour, ce rêve éveillé qui s'appelait Yukio.

Yukio sentait le cœur de Kaito battre à tout rompre contre son torse, tout comme le sien ne décélérait pas, comme à chaque fois qu'il se trouvait près de lui. Mais cette fois, il se sentait encore mieux, il savait à présent que le plus jeune était comme lui, il voulait rester avec lui. Le baiser que lui offrit Kaito le coupa dans ses réflexions. Une nouvelle fois, il se senti transporté dans un monde magnifique, et lorsqu’il sentit sa langue contre la sienne, un tsunami de sensations le submergea instantanément . Si bien qu'un soupir lui échappa.

Le baiser prenant fin, Yukio se sentait encore en pleine extase. Un sourire candide heureux ne voulait pas le quitter.

« Tu disais ? » Lui demanda-t-il en essayant de revenir à la réalité, et de se rappeler des paroles de Kai. « Hum… Ah… Tu veux tout savoir sur moi c'est ca ? Ca ne sera peut-être pas très intéressant… Par quoi commencer ? » Continua-t-il, avant de reprendre une nouvelle fois essayant de répondre aux questions. « Je suis né à Tokyo, mes parents sont adorables, je n'ai ni frère ni sœur… J'avais commencé des études au conservatoire, mais comme la boutique de mes parents a fait faillite, j'ai dû arrêter et on est venus ici… Après… Ce que j'aime… La musique, le chant, Kaito, les étoiles, le chant du vent, plein d'autres choses… » Raconta-t-il avec un petit rire. « Ce que je n'aime pas ? Hum… Etre loin de toi… Ce qui me fait vibrer ? Hum… » Une coloration rouge prit alors place sur ses joues. « Tes baisers… Et chanter… » Il éclata alors de rire. « Ce n'est pas une calamité, il est adorble. Suishou… Je l'ai trouvé un jour dans un carton sur le trottoir sous la pluie. Il était si petit et si mignon… je ne pouvais pas la laissé. Et depuis il est avec moi… »

Avoir tant parlé lui avait donné soif et lui aussi vida rapidement son verre.

« D'autres questions ? » Demanda-t-il avec un doux sourire.

Pendant tout le récit de son petit ami, Kaito ne l'avait pas quitté des yeux, buvant avec avidité le moindre de ses gestes, la moindres de ses expressions, la plus petite de ses mimiques, le plus infime de ses tics. Il avait l'impression de ne plus être vraiment lui-même, comme s'il était ensorcelé. Mais s'il en croyait les réponses de son petit ami et le nombre de fois où il l'avait cité, il n'était pas le seul dans ce cas.

- Qu'est ce que tu m'as fais ? murmura-t-il en le reprenant contre lui. Tu m'as jeté un sort ? Qu'est ce qu'ils diraient, mes potes de la rue, s'ils me voyaient maintenant ? Comment tu as réussi, en moins d'une journée, à changer le dragueur invétéré que j'ai toujours été en ce que je suis maintenant ? Je comprends pas... Mais c'est pas grave, ça me convient. J'ai pas envie de te laisser à qui que ce soit d'autre, j'aurais trop peur que tu sois souillé... Yu'... ne me quitte jamais...

Ces derniers mots, Yukio ne pouvait pas le savoir, mais ils témoignaient de cette peur de l'abandon qui le tenaillait depuis le départ de leur frère Sora. C'était pour ça qu'il n'avait toujours que des aventures sans lendemain : pas d'attachement = pas d'abandon. Il ne l'avait jamais dit à personne parce que Koya était le plus touché de cet abandon, alors il avait enfoui cette peur au fond de lui. Et voilà qu'elle refaisait surface.

Blotti contre son Kaikai, Yukio était sur son petit nuage. Une bonne fée avait dû se pencher sur eux pour qu'ils se soient trouvés ainsi. Comme si tout ce qui leur était arrivé dans la vie n'avait eu lieu que pour qu'ils se rencontrent. Ensorcelés, oui… Yukio avait ensorcelé Kaito tout comme lui-même l'avait ensorcelé.

« Tu m'as aussi ensorcelé… C'était notre destin de nous rencontrer. Tes potes diraient que tu as de la chance ? Que tu es mignon ? Ou plutôt adorable… » Les bras de Yukio le serrèrent plus fort contre lui. Il avait décelé dans la voix de Kai une fêlure qui lui creva le cœur. Une sorte de douleur qu'il gardait enfouie en lui. « Je suis là » Lui murmura-t-il. « Je ne te quitterai pas… Sans toi… Ma vie n'aurait aucun sens à présent… »

Il le pensait. Lui qui avant se complaisait dans la solitude avait l'impression qu'à présent, sans Kaito, il ne serait jamais complet, qu'il sentirait toujours un vide immense dans son cœur. Comme pour sceller ces paroles, le chanteur embrassa tendrement son petit-ami… Son cœur s'emballa juste avec cette pensée… Petit-ami… Nyaaah