Miam une friandise

Nao se laissa entraîner vers le lit et s'installa dessus, regardant Koya fermer les rideaux. Une peur indescriptible s'insinua soudain en lui lorsque son hôte ferma la porte de la chambre. Il hésita un moment à le retenir, pour ne pas rester seul dans cet environnement inconnu, mais encore une fois il n'osa pas. À la place, il observa la pièce, elle était plutôt agréable, et le lit semblait confortable comme il le lui avait dit, et il l'attirait fortement. Mais pouvait-il dormir avec les vêtements que son hôte lui avait prêtés ? Il risquait de les abîmer. Hésitant un peu, il se déshabilla, ne gardant que le sous-vêtement, et se pelotonna sous la couette moelleuse, bien callé contre l'oreiller.

Contrairement à ce qu'il pensait, il s'endormit très rapidement, ce lit était vraiment trop confortable pour résister. Cependant sa nuit ne fut pas aussi calme qu'il l'aurait voulu, plusieurs cauchemars le hantèrent. Lorsqu'il dormait dans la rue ou au manga-café, il dormait tellement mal et sur la qui-vive qu'il n'avait pas le loisir de faire des cauchemars. Mais ici, dans cet environnement inconnu, dans ce lit si moelleux, loin des dangers de la rue, sa nuit était très troublée.

Vers le milieu de la nuit, un cauchemar plus violent le réveilla dan un grand cri… Assis dans le lit, les yeux embués de larmes, le souffle court, Nao essayait de calmer son cœur et ses angoisses.

Un grand cri réveilla Koya en sursaut au milieu de la nuit. Encore ensommeillé, le jeune homme commença par se dire que son frère lui cassait franchement les pieds à crier comme ça, avant de réaliser qu'il n'était pas là et il mit quelques secondes avant de réaliser d'où venait le cri en question. Nao !
S'éjectant littéralement de son lit, il alluma la lumière du couloir, se précipita vers la chambre d'ami, ouvrit brusquement la porte et se précipita à l'intérieur.

- Nao-kun, est ce que tout va bien ?! s'exclama-t-il, pour une fois sincèrement inquiet.

C'est alors que son regard tomba sur la tenue, ou plutôt l'absence de tenue de son invité et il dut se retenir de toutes ses forces de se lécher les lèvres d'un air de prédateur. S'il donnait ne serait-ce que l'impression de intéresser physiquement à sa cible, il ne faisait aucun doute pour lui que celle-ci prendrait la clé des champs et qu'il ne le reverrait jamais. Patience donc, il fallait continuer à jouer les gentils garçons altruistes.
Il s'assit sur le lit près de lui et lui caressa gentiment les cheveux.

- Tu as fais un cauchemar, pas vrai ? Est ce que tu veux m'en parler ?

Sa voix était normale, mais jamais depuis le départ, Koya n'avait eu autant de mal à jouer son rôle.

Tout tremblant, Nao tentait de calmer son cœur et sa respiration. Il ne se rappelait pas vraiment de son cauchemar, il se souvenait juste de sensations horribles, et d'ailleurs il ne voulait pas se rappeler. Pourquoi, pour une fois qu'il pouvait dormir dans une vraie chambre, en sécurité, il n'avait pas le droit à une bonne nuit de sommeil. Peut-être était-ce l'absence de bruit ? Ce n'était jamais silencieux là où il dormait habituellement.

La porte s'ouvrant brusquement le fit sursauter, mais il se détendit un peu lorsqu'il comprit que c'était son hôte. Sa main dans ses cheveux l'apaisa quelque peu, mais pas assez à son goût. Mû par une sorte de réflexe inconscient, les bras de Nao, encore tout tremblant, se refermèrent autours de la taille de Koya, la joue collée contre son torse, cherchant sa chaleur et sa présence.

« Ou… oui… Un cauchemar… Pas en parler… Juste oublier… »

A la grande stupeur de Koya, Nao l'enlaça brusquement et se serra contre lui, cherchant sa chaleur comme un chaton et encore tout tremblant du mauvais rêve qu'il venait de faire. Le jeune homme était tellement timide et réservé depuis le départ, que ce brusque câlin lui fit perdre contenance l'espace d'une minute et, instinctivement, il referma les bras sur lui, lui caressant gentiment le dos sans qu'aucune pensée perverse ni aucun calcul ne lui traverse l'esprit. Là, pour le moment, il avait juste envie de le réconforter de son mieux.

- Shhhhht... Calmes-toi... C'est rien, ça va aller, lui dit-il doucement. Tu es en sécurité ici, personne ne te fera plus jamais de mal.

Et sur le coup, il le pensait réellement alors qu'en fait, le plus grand danger que puisse rencontrer Nao, c'était bel et bien lui-même. Cette pensée venue du plus profond de sa vraie nature manqua d'ailleurs sauver la vie du danseur, mais les mauvaises habitudes étaient si encrées en Koya, que ses manières de salopard reprit le dessus sur ce bon mouvement.

- Je vais te ramener un verre d'eau. Essaye de te rendormir d'accord ? dit-il de nouveau de son faux air concerné si convainquant. Enfin à moins... que tu ne veuille pas rester seul ? ajouta-t-il d'un ton incertain.

Et là, clairement, vu son état de détresse émotionnelle, il était presque certain qu'il allait lui répondre qu'il ne voulait en effet pas dormir seul, ce qui serait une deuxième victoire pour Koya.

Après avoir enlacé son hôte, le jeune danseur réalisa soudain son geste et eu peur qu'il ne le considère comme déplacé et qu'il le rejette brusquement. Il n'osait plus bouger, à peine respirer, alors que son cauchemar le tourmentait encore. Lorsque ses bras se refermèrent autours de lui, il se sentit soudainement mieux. Ce genre de contact humain, il n'en avait plus depuis si longtemps, et ils lui manquaient tant. La seule à lui avoir fait ce genre de câlins était la gouvernante qu'il avait quand il était petit. Ses parents étaient bien trop occupés pour perdre du temps avec ce genre de démonstrations affectives. Ses amis n'étaient avec lui que parce qu'il était le fils Sasazaki, il en était de même avec ses nombreuses conquêtes de l'époque pour qui il n'était qu'un trophée. Et depuis qu'il était à la rue, les seuls contacts qu'il avait eus étaient… Il préférait ne pas y penser.

« Merci… » Murmura-t-il alors qu'il resserra un peu son étreinte.

Les caresses sur son dos l'apaisaient, et ses tremblements diminuaient de plus en plus. Etait-ce possible que grâce à lui, il puisse éviter les cauchemars ? Koya lui proposa un verre d'eau, il s'écarta alors de lui pour le laisser partir, mais avec un air de chaton triste qui avait inconsciemment pris place sur son visage.

« Tu… Vous… Pouvez rester avec moi ? Je… j'ai… » Il marmonna de façon incompréhensible le dernier mot… Il avait peur de se retrouver seul ici.

Le sentir se détendre entre ses bras fut une nouvelle victoire pour Koya, qui se disait que le moment où Nao aurait un besoin vital de lui n'était peut-être pas aussi loin qu'il le pensait au départ.
Souriant toujours gentiment, il caressa tendrement la joue du danseur et l'embrassa sur le front (pour le moment il n'allait pas se risquer à davantage, ce serait un mauvais calcul de sa part).

- Très bien Nao-kun, je reste avec toi. Ne t'inquiète plus de rien et rendors-toi, dit-il en appuyant doucement sur ses épaules pour qu'il se recouche, avant de se glisser près de lui dans le grand lit et de le reprendre dans ses bras. Les cauchemars n'oseront plus revenir avec moi près de toi, ajouta-t-il doucement en lui caressant le dos pour terminer de l'apaiser.

Il devait avouer que jamais depuis qu'il avait commencé à jouer avec ses conquêtes, il n'avait du prendre tant de gants ni jouer autant la comédie. Mais ça le changeait agréablement. Et puis le corps qu'il sentait tout contre lui était bien agréable lui aussi. Le jour où il en prendrait possession serait absolument divin. Mais il ne devait pas y penser, sinon il allait réagir physiquement et faire peur à son... actuel compagnon de lit et encore une fois, le faire fuir n'était pas dans ses plans. Pas après tout ce qu'il avait fait pour réussir à le garder près de lui.

Pour la première fois depuis si longtemps, Nao se sentait en sécurité dans cette chambre, loin des tumultes de la rue, et surtout entre les bras de son hôte. Il était si gentil et prévenant avec lui , lui qui n'était rien, un parasite qui n'avait nulle part où aller, il l'avait accueilli, nourri, logé, rassuré, protégé. Ses gestes si tendres et doux, Nao n'en avait vraiment pas l'habitude. Il parvint alors à se calmer et s'allongea de nouveau, sous la pression de Koya.

« Merci… »

D'abord intimidé, Nao n'osa pas s'approcher trop de Koya, le touchant le moins possible. Mais sa chaleur l'attirant, il finit par se blottir contre lui, la tête posée contre son torse. Ainsi entouré de sa chaleur, il s'endormit paisiblement, sans être dérangé par des cauchemars.